lundi, octobre 23, 2006

cafardnaüm


Les pluies reviennent déjà sur notre beau pays, suivies de près par leur interminable cortège d’antipathiques chafouinades d’automne. Force est de constater qu’il va falloir définitivement renoncer à nos dernières espérances de voir s’éterniser ce surnaturel été indien.
La pilule est certes difficile à avaler, on recule, on rechigne, non je ne vais pas déjà ressortir collants et chaussettes, non le gaspacho ne se fera pas tout de suite voler la vedette par un velouté réconfort d’hiver et non de non je ne veux pas avoir à imaginer le sempiternel retour des goûtes, pastilles, pommades, gélules et autres suppo aux accents d’eucalyptus.
Pourtant, ami(e)s du Nord de La Loire rassurez-vous ! Le péril serait subjectif. Le danger pas aussi irrémédiable qu’il n’y parait. Un livre vient pourfendre ces funestes menaces pour nous sauver la mise, du moins pour cette année.
Notre messie : François Reyanert. Son objectif: frapper un grand coup sur le moral des troupes plutôt que de distiller le spleen ambiant par doses homéopathiques.
C’est la technique dite du sparadrap. On tire d'un coup, net et efficace plutôt que d’user d’une tendresse toute de façade en arrachant un par un les petits poils si frêles mais si tenaces.
Il le dit lui-même, son livre est dédié « au chien qui boite, aux zones pavillonnaires une après-midi de semaine, au dimanche en général, à tout ce qui de façon universelle et assurée, nous colle le bourdon ».
Rien de tel que de délimiter l’ennemi, de l’assigner à résidence, de le circonscrire dans son entièrté afin de mieux l’assommer, le juguler que dis-je l’assassiner !
Dans son petit panier Reynaert jette en vrac tout ce qui nous pourri l’existence, du plus dérisoire des dégoûts aux plus infernales des désenchantements.
Florilège : le petit cirque : « Tous ces gens groupés en cercle sur de pauvres bancs de bois (…) et cette âcre odeur de bête mouillée et de pull marin humide qui flotte dans l’air alors que nous en sommes à la pyramide zoologique, deux caniches vieillissants sont sur le dos d’une chèvre qui bave, elle-même montée sur le dos d’un lama sans âge…Le cirque colle le bourdon parce que le cafard est lié au cirque de façon ontologique. Prenez n’importe quelle pièce, film, opéra qui se passe autour d’une piste et vous verrez : dès le premier plan sur le trapèze, on sent qu’on va se ramasser une catastrophe en pleine figure. »
La maison de retraite : « Tout y est ralenti, feutré, on dirait que l’ascenseur lui-même se déplace en pantoufles tellement il est lent (…) de longs couloirs sont décorés de couchers de soleil sur le Rhin en aquarelle, des biches à l’étang en tapisserie, des cadeaux faits de la main même d’anciens pensionnaires (de telles horreurs ne peuvent être en vente libre). »
On referme son livre comme un tube de Xanax, le sourire aux lèvres avec la suffisance du dompteur qui a su maîtriser la bête.
Un ouvrage à s’offrir pour Noël pour faire passer la dinde et les guirlandes.

vendredi, octobre 06, 2006

Zeller mais pas la chanson

S'il y a bien une chose qu'on ne peut pas reprocher à Florian Zeller, c'est d'être franc sur la marchandise qu’il nous vend. Dès le titre, nous voilà avertis par quelques indices loin d'être sibyllins : "Neiges artificielles", "La fascination du pire", "Les amants du n'importe quoi", (je mets en gras l'évidente évidence mais c'est à Monsieur Zeller que je crois devoir ce goût immodéré de la redondance...) bref des titres en forme d'avertissement aux lecteurs.
Bien malin celui qui ira se plaindre qu'il vient d'acheter un truc pas frais, mon gars c'est écrit dessus, t'avais qu'à lire...
Avec "Julien Parme", on entre dans une zone soudain suspecte, l’usage du patronyme éponyme.
Pourquoi pas Maurice Salami, ou Robert Pastrami, j'avoue un faible pour Enrico Pas et Rosette Delion mais là je dérape sur le culinaire et c'est sans rapport à première vue avec l’objet de notre étude.
Bon, avec ce Julien Parme on nous prévient dès la quatrième de couv' qu'on va enfin pouvoir renouer avec le Holden Caulfield de Salinger et l'Antoine Doinel des 400 coups etc. Bref, du lourd.
Ça m'a un peu filé les chocottes au début, je me suis aussitôt dis que ce pauvre Zeller allait nager la brasse du petit chien dans ce costard de chez Capel mais bon il faut pas non plus laisser tout dire à son éditeur et surtout il faudrait avoir la force de lui interdire de sortir des énormités du type "Julien Parme" roman de l'initiation a mi-chemin entre Julien Sorel du Rouge et le Noir et La Chartreuse de Parme...
A sa décharge, Zeller botte en touche sur le site de son éditeur et rétablit un semblant de vérité en rejetant gentiment cette pesante filiation.
A vrai dire, cela ne le rend que plus aimable à mes yeux.
Ce qui est désarmant avec cet écrivain, c'est sa grande sensibilité, son aspect je me la ramène pas loin des Beigbeder et des Nicolas Rey qui se prennent pour des cacous de la littérature contemporaine. Lui, à coté de ces grands entubateurs de mouches fait profil bas, parle posément et sans emphase ce qui le rend globalement plutôt touchant. Le coeur de mon porte-monnaie étant en téflon certifié normes AZF n'a lui par contre pas encore fondu à ces arguments mais bon c’est la femme qui parle pas la raison. Quoi que.
Afin de vous éviter l’achat inutile de ce roman aussi initiatique qu’un calendrier des postes, voici un modeste résumé de l’intrigue :
Julien Parme petit bourgeois de 14 ans se sent mal aimé par sa mère en passe de se remarier avec un ploucos portant lavallière et chevalière. Se sentant coincé par des décisions parentales qu’il ne comprend pas, il décide de fuguer dans le XVIè arrondissement emportant avec lui la Mastercard du beau-père.
Comme le dit si bien le héros vers la fin de l’histoire : « Pas de quoi se pendre en slip ».
Arrête Florian, la franchise ça paye pas.